JACQUELINE

Texte d’Anne-Laure Albessard.

Bibliothèque
La maison en pierres, tournée vers la mer, a été construite dans les années 50. On sent l’influence de Le Corbusier et de Pouillon. Dans le salon du rez-de-chaussée, une bibliothèque blanche encastrée dans le mur fait face aux grande baies vitrées. Les parties inférieures sont destinées aux livres d’art et les étagères supérieure aux romans classés par auteur ou par collection. On trouve beaucoup de livres des éditions Rivages. Et pour cause, nous sommes chez Jacqueline Egger Guiramand qui a fondé ces éditions en 1984, à Marseille, avec Édouard de Andréis et Jean-Louis Guiramand. Parmi les auteurs qu’elle a publiés, elle cite avec émotion les noms de Barbara Kingsolver ou Wilma Stockenström, une poétesse sud-africaine. Jacqueline est également la fille de l’architecte René Egger. Sans doute est-ce pour cette raison qu’elle parle des livres comme on parlerait d’architecture: « Les livres sont des briques, dit-elle. Ils font partie des pierres de notre construction. ».

Conseils de lecture
Lorsqu’on lui demande quels sont les livres qui l’ont le plus marquée, Jacqueline cite immédiatement les ouvrages des géants de la littérature américaine. Elle a lu cinq ou six fois Un endroit où aller, la grande fresque américaine de Robert Penn Warren, et a adoré Un lit de ténèbres de William Styron qui relate, dans la droite lignée de Faulkner, la lente désintégration d’une famille bourgeoise de Virginie et le tragique destin de Peyton Loftis, jeune névrosée qui finit par sauter du haut d’un gratte-ciel new-yorkais. Jacqueline aime aussi la science-fiction, mais n’en lit plus. Croisière sans escale, un roman de l’écrivain britannique Brian Aldiss l’a tant marquée qu’il ne lui a plus été possible d’en lire d’autres après celui-ci. Elle admire l’univers de Haruki Murakami, notamment dans ses Chroniques de l’oiseau à ressort. « Il a inventé un univers magique qui lui est propre. Son écriture alliée à cette incroyable construction emporte le lecteur. » Jacqueline cite également Le Mur invisible de Marlen Haushofe, journal de bord d’une femme ordinaire qui, après une catastrophe planétaire, se retrouve seule dans un chalet en pleine forêt autrichienne, séparée du reste du monde par un mur invisible au-delà duquel toute vie semble s’être pétrifiée.

Le plaisir de la lecture
Jacqueline aime suivre les conseils de ses proches et jette toujours un oeil intéressé et curieux sur le travail de ses confrères, en librairie. Elle lit tout le temps. Près d’une cheminée, sur un bateau ou sur une terrasse au soleil, dans un avion, le soir avant de s’endormir et même en conduisant. Elle a découvert La Duchesse de Langeais au volant, grâce à un enregistrement de Fanny Ardant et a percuté une voiture en découvrant que les lettres d’amour de la duchesse restées sans réponse n’avaient même pas été lues par le général Armand de Montriveau. Depuis, Jacqueline a relu plusieurs fois le roman de Balzac et se plait à le raconter à sa petite fille.

Prêt ou donation des livres
Parfois, Jacqueline se sépare de livres qu’elle ne lit plus, les porte chez Emmaüs ou la Croix-Rouge. Elle veut que les livres deviennent accessibles à tous. Pourtant, il lui est toujours difficile de s’en défaire. Elle a élaboré un système de pastilles afin de marquer les livres qu’elle souhaite absolument garder. Elle y pense la nuit, change d’avis, revient sur une décision prise. « Un endroit où aller est arrivé en première position car il a été sauvé deux jours plus tôt de la sélection. Mais, selon moi, rien que son titre justifie son maintien parmi les livres que je dois garder. » Lorsqu’elle prête un livre qui lui tient à coeur, elle attend un retour, espère que son intérêt sera partagé. Cela la renvoie sans doute à son travail d’éditeur. Elle cherche toujours à savoir si son goût pour un livre n’est pas dicté par une émotion trop personnelle.

LES BONNES ADRESSES:

La librairie L’Odeur du temps, à Marseille, pour le travail des libraires.
Les grandes librairies du type Fnac qui donnent toujours une idée des mouvances du marché.