FRANÇOISE

La bibliothèque (et quelques manies) – Celle de Françoise est faite sur mesure. L’une des consignes données à l’artisan, était la création d’étagères au format livres de poche et des placards pour cacher les magazines.

Depuis, en plus des livres, il y a les plantes et les fleurs. Omniprésentes dans la bibliothèque mais aussi dans la maison, baignée de soleil et d’une douce atmosphère.

Pour le classement, idéalement Françoise privilégie par éditeur puis par ordre alphabétique. « Et si je pouvais, je planquerais tous les livres qui ne sont pas à moi. » Contre son gré, subsistent dans la bibliothèque quelques polars, ceux de son mari. Françoise, elle, n’en lit jamais. On aperçoit des livres pour enfants. « Ah non, ceux-ci sont à moi ! Il y a mes livres d’école, mais aussi les albums que je lisais à mes enfants. » Et elle doit bien avouer qu’elle les achetait plus pour elle que pour eux.

La douceur de Françoise est une évidence lorsqu’on la rencontre. Cela se voit dans sa façon d’être, de parler, d’écouter. Cela se sent également dans son intérieur très poétique et rempli de détails. Mais il y a un sujet sur lequel elle se montre très ferme : elle n’a jamais aimé prêter ses livres, et n’aime toujours pas ! Elle se souvient de cette amie avec qui elle allait à l’école, enfant, à vélo, et dont la maman proposait toujours de faire des échanges de livres. Rien qu’en y repensant, Françoise semble contrariée : « C’est un mauvais souvenir, ça. » Elle nous montre, désolée, un roman adoré, La maladie de Sachs de Martin Winckler. Prêté à un ami, le livre est revenu bien abimé d’une journée à la plage. « Pour moi c’était horrible. Depuis cet ami se moque de moi. Mais ça m’avait fait vraiment de la peine. » Aujourd’hui encore Françoise préfère toujours offrir les livres qu’elle a aimés pour les partager.

Depuis l’enfance également, elle a une jolie manie, moins difficile à avouer : elle inscrit à l’intérieur de chaque livre son prénom, son nom et la date à laquelle le livre a été lu et refermé. « Ainsi lorsque je reprends un livre je me souviens toujours instantanément de ce que je vivais à ce moment-là ». Elle conserve les articles de presse sur les livres aimés. Les cartes postales reçues servent de marque page. Si bien que chaque livre transporte littéralement son lot de souvenirs.

Alors oui, cette bibliothèque ressemble bien à Françoise : « Mes livres avec les dates qui jalonnent ma vie, les fleurs, les plantes, les livres d’école, les livres d’enfants. C’est tout moi.»

Lecture et souvenirs – Son entrée dans la lecture, Françoise en garde un souvenir intact. C’était en CP, dans sa Bretagne natale, une rencontre déterminante avec sa maîtresse, une jeune femme formidable, qui gardait toujours une veste en laine sur ses épaules. A ce moment précis, cette femme a fortement marqué et inspiré Françoise. La petite élève qu’elle était a très vite appris à lire, et, plus tard, elle est devenue à son tour maîtresse d’école. Aujourd’hui, si vous entrez dans sa classe, vous verrez une jolie veste en laine, posée sur sa chaise.

De cette année de CP mémorable, Françoise se souvient de chacune de ses lectures : elle a d’ailleurs religieusement gardé Au fil de mots, la méthode d’apprentissage de la lecture de l’époque. Ainsi que les Nouvelles histoires d’une toute petite fille dont le prénom était Mili Mali Malou (« c’était difficile à lire ! »). Françoise continue de chercher dans les vide-greniers et les brocantes un livre dans la collection Rouge et Or dont l’héroïne était une jeune fille qui devenait maîtresse d’école à la montagne. « Moi qui n’aime ni le froid, ni les montagnes, je me souviens encore de la chaleur du poêle dans cette classe. »

A la maison, ce sont les livres d’Emilie de Domitille de Pressensé qui accompagnent ses premières lectures. L’émotion est toujours aussi vive lorsque Françoise relit Emilie n’a pas sommeil. « Voilà le livre qui me faisait toujours beaucoup de peine, au moment où je lisais que les parents ne montaient pas l’embrasser. Je peux vous assurer que lorsque je lis ce livre à mes élèves, et bien ils sont aussi tristes que moi.» Est-il besoin de préciser que Françoise a toujours ses livres d’Emilie, avec son prénom et la date de lecture inscrits à l’intérieur de son écriture enfantine ?

Dernier souvenir d’enfance : celui d’un été merveilleux, avant l’entrée en sixième. Un été breton et pluvieux. Sa chambre et celle de sa sœur sont en travaux. La lecture est leur principale occupation et leur mère les autorise à aller acheter un livre à la Maison de la Presse du village, sitôt le précédent terminé.

Lectures et lumière – Françoise est restée une grande lectrice. Ce qu’elle préfère ce sont les romans. Avec un intérêt particulier pour les rentrées littéraires. Si elle a une vague idée de ses gouts littéraires, son entourage, lui, a un avis bien précis. D’après son mari, ce n’est pas compliqué, Françoise aimerait n’importe quel roman français qui se passe à Paris. En revanche, d’après sa fille, ce qui lui plaît vraiment ce sont les histoires de naissance et les romans sur la Shoah. Quel étonnement lorsque sa fille, basée sur cette description et conseillée par une libraire consciencieuse est revenue avec le livre Kinderzimmer de Valentine Goby. Cela devait être juste après la lecture de Ces rêves qu’on piétine de Sébastien Spitzer dont Françoise avait beaucoup parlé à la maison.

Pour nous faire notre propre avis, nous regardons sa table de nuit et les derniers livres lus : Quand tu écouteras cette chanson de Lola Lafon, Le coût de la vie de Déborah Lévy. Hommes d’Emmanuelle Richard. Elle a aussi récemment aimé Les enfants endormis d’Anthony Passeron et Que reviennent ceux qui sont loin de Pierre Adrian. « C’est un roman beau et triste comme un été en Bretagne. »

Nous repartons un peu en arrière pour évoquer sa rencontre avec l’écriture de Marguerite Duras : « ça a commencé par la lecture de Moderato Cantabile. C’était la première fois que je lisais une ambiance. » Et il y a Noces d’Albert Camus, adoré quand elle était étudiante. Un moment précieux y est attaché : en se promenant dans la librairie Dialogues à Brest peu de temps après l’avoir lu, elle tombe sur ce livre. Et commence à lire à voix haute. Toute la librairie s’arrête et l’écoute. Le temps se suspend. Françoise rejoue la scène pour nous et lit : « Au printemps, Tipasa est habitée par les dieux et les dieux parlent dans le soleil et l’odeur des absinthes, la mer cuirassée d’argent, le ciel bleu écru, les ruines couvertes de fleurs et la lumière à gros bouillons dans les amas de pierres ».  Elle comprend ce qui l’avait tant touchée. « Ce livre parle de lumière, et moi la lumière à l’époque, en Bretagne, je ne la connaissais pas. » Quand elle a déménagé à Marseille peu après ses études, elle a retrouvé un peu de Tipasa.

Quelques adresses :

« En librairies : Pantagruel, installée depuis 6 ans et qui a redynamisé le quartier.

Les grandes largeurs à Arles. On y trouve tout ce qu’on ne cherche pas.

Deux autres très bonnes librairies à Marseille : Mazette et Histoire de l’œil

 

Pour le reste, toujours à Marseille : La butinerie (café fleuriste) et Poésie fleurs, parce qu’on lit mieux dans une maison fleurie.

Sessun Alma pour les céramiques et leur sélection de beaux livres.

Brûlerie Moka car si ce café était près de chez moi, je m’y installerais plus souvent pour lire avec une tasse de café ou un bon latte.

Encore un morceau, pâtisserie pétillante qui propose des petits gâteaux parfaits pour discuter autour d’une bibliothèque (ndlr : on confirme, on a gouté, c’était parfait). »