ANNE 1/2

Bibliothèque – « L’uniformité m’angoisse » explique d’emblée Anne comme pour justifier son choix d’avoir plusieurs petites bibliothèques dans son appartement. « Il n’y en a pas une qui ressemble à l’autre et ça me plaît ! » Chaque bibliothèque est l’objet d’un coup de cœur, suit un ordre ou une logique que seule Anne maîtrise, mais chacun peut venir emprunter un livre. Anne résume : « Des livres rangés mais pas figés ! »

Lectures – Anne lit principalement des romans, mais elle reconnaît être peu attirée par les nouveautés – mais on repère tout de même quelques livres d’auteurs contemporains et plusieurs numéros de la revue Décapage. « Je lis lentement et j’aime reprendre des livres déjà lus », explique-t-elle. Ce qui l’intéresse, plus que l’histoire, c’est le style de l’auteur. En apprécier les phrases et essayer de comprendre comment l’auteur écrit – sans doute une déformation professionnelle, Anne enseigne la littérature dans un lycée. Cette lecture – cette étude, devrait-on dire – n’est donc pas compatible avec une lecture rapide. Anne prend des notes et n’hésite pas à crayonner ses exemplaires.

« Récemment, j’ai retrouvé avec une certaine émotion les notes prises dans les marges de La chartreuse de Parme de Stendhal, lorsque j’étais étudiante… il y a presque 20 ans ! » Elle continue de lire aujourd’hui, crayon à la main. On ne change pas ses habitudes, comme ça. Nouveau coup d’œil aux bibliothèques : effectivement, on note quelques grands stylistes, Anne les énumère : « Céline, Proust, Robbe-Grillet, Stendhal, Maupassant, Camus… Voilà les premiers noms qui me viennent… » « Et Rimbaud ! » s’empresse-t-elle d’ajouter, comme si on allait partir sans prendre le temps de noter son nom. « C’est pas très original, mais sa poésie a été pour moi une vraie révélation ! » Depuis, Anne fait chaque année étudier à ses élèves les sonnets Le bateau ivre et Venus anadyomène. « C’est du pur génie ! »

Cette année, elle a goûté à la littérature contemporaine en participant avec ses élèves, à un prix littéraire. « C’était une belle expérience et j’ai découvert l’œuvre sensible et poétique de Thomas Vinau. » Dernier coup d’œil aux bibliothèques, on aperçoit quelques romans graphiques. « L’Arabe du futur, incontournable et génial ! ».

Héritage – Anne prête facilement ses livres. Il faut veiller à les rapporter et les remettre dans la bonne bibliothèque. Ce n’est pas par maniaquerie, c’est pour être sûre de ne pas en égarer. « En plus du goût de la lecture que j’aimerai transmettre à mes deux filles, je voudrais leur laisser mes livres. » (Le plus tard possible.) Anne a elle-même hérité d’une partie des livres de ses grands-parents et arrière-grands-parents. On les trouve d’ailleurs dans sa chambre, près du lit. « C’est très émouvant de tenir dans les mains un livre lu et aimé par mon arrière-grand-mère. Cela constitue mon ciment en quelque sorte ». Et si les filles n’aiment pas lire ? Elles auront la liberté de choisir. Être lectrices, ou ne pas être. On ne peut pas forcer à lire. « Pennac explique dans Comme un roman qu’il faut s’accorder le droit de fermer un livre, de ne pas le finir. Cela me semble important pour que la lecture reste un plaisir et un choix » conclut Anne.